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Chroniques économiques (Club Turgot)

Le modèle d’affaires, couteau suisse du management


Revue Question(s) de management 2023/3 (n° 44), Le renouveau des modèles d'affaires, pages 193 à 251, Éditions EMS Editions, dirigé par Soufyane Frimousse, Jean-Marie Peretti.

Le modèle d’affaires, couteau suisse du management
La notion de modèle d’affaires (business model ou BM) constitue un des fondamentaux du management stratégique depuis un demi-siècle. Son histoire se confond avec celle du management des entreprises. Le BM fait l’objet de nombreuses définitions – jusqu’à 43 selon Moyon (2011) – les plus courantes l’assimilant à un levier de création de valeur ou à un outil de construction d’un avantage concurrentiel.

Il présente un caractère à la fois holiste (il mobilise toutes les ressources de l’entreprise), systémique (il recouvre toutes ses interactions) et dynamique (il doit s’adapter aux changements de l’environnement). Il est soumis à des contingences sectorielles (il s’ancre dans un métier) et temporelles (son cycle comporte des phases et un horizon). Il dévoile un projet (Desreumaux et Brechet, 2018) ou révèle une intention stratégique (Hamel, Prahalad, 1989).

Sa qualification de « modèle » lui confère des dimensions pragmatiques (il est parfois présenté comme un « guide » ou un « programme ») et normatives (il s’inscrit dans une typologie), selon Desreumaux (2014). Le concept – ou plutôt le méta-concept – de BM a été construit au cours des années 1960 par des économistes industriels, qui l’ont défini comme une source d’avantage compétitif, puis il a$ été déconstruit, à partir des années 1980, par des financiers, qui ont réduit sa portée en l’exposant aux fluctuations plus ou moins erratiques des marchés.

L’émergence de l’économie numérique, fondée sur l’internet, l’Intelligence Artificielle et le big data, l’ont transformé en « modèle d’affaires digital », soumis aux démarches abductives de la conception créative (design thinking) et à des tests de faisabilité (proofs of concept). Les impératifs dictés par les transitions énergétique et écologique lui ont parallèlement imposé d’être « soutenable » et de créer des valeurs financière mais également sociale et écologique.

Le BM est ainsi devenu un narratif au service d’une gouvernance et d’un management plus partenariaux. L’intégration des parties prenantes de l’entreprise ont en effet contraint ses stratèges à mettre en oeuvre des « BM écosystémiques ». Les nouveaux facteurs de contingence du BM l’ont ainsi digitalisé, verdi et systémisé, confirmant ses caractères à la fois générique et flexible, et donc son qualificatif de « couteau suisse ».

Mais ces transformations ont surtout révélé sa fonction d’apprentissage enrichi par les effets d’expérience de ses acteurs. Les changements actuellement entraînés par la déglobalisation des marchés et la réindustrialisation du territoire français, marquent-ils le retour de l’homo  strategicus (Martinet, 2022) et de la performativité du BM ?
 
Jean-Jacques PLUCHART, Professeur à l’Université Paris 1-Panthéon-Sorbonne


 

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