1. A l’heure actuelle...
Derrière la gestation pour autrui (GPA), on s’intéresse ici sur les questions de management autour des pouvoirs publics. Quels sont aujourd’hui les contraintes d’une politique publique face à la GPA ?
Entre le terme « gestation pour autrui » et le terme « mère porteuse », deux écoles : d’un côté des militants qui défendent la légalisation pure et simple de la GPA, de l’autre côté, des féministes qui rejettent la pratique au nom de la dignité, de l’anticapitalisme et du refus de la marchandisation du corps humain.
Aujourd’hui, la GPA est interdite en France. Cependant, en étendant la procréation médicalement assistée (PMA) à toutes les femmes, même célibataires, en 2017, le Président Emmanuel Macron a réveillé les anti-GPA et leurs craintes d’un effet domino tendant vers la légalisation de la gestation pour autrui.
La question qui s’est alors posée au niveau de la Cour de cassation est la suivante : faut-il autoriser des femmes à porter un enfant pour d’autres, gratuitement ou moyennant rémunération ?1
Bien que la classe politique soit majoritairement opposée à une telle mesure, certains tranchent en évoquant une légalisation de la pratique pour mieux la contrôler.
De plus, la France se retrouve dans une position délicate vis-à-vis de la législation de la Cour européenne. En effet, bien que la loi française interdise toujours à l’heure actuelle la pratique de la GPA sur son territoire, la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) avait bel et bien condamné la France en 2014 en estimant « qu’elle ne pouvait porter atteinte à l’identité des enfants nés de mères porteuses à l’étranger en refusant leur inscription à l’état civil ». A cet effet, et ce depuis 2015, l’état français reconnaît que la GPA ne doit pas empêcher la transcription de l'enfant sur l’état civil français.
Ainsi, la situation française est aujourd’hui ambiguë puisqu’elle reconnait les enfants issus de GPA à l’étranger mais n’accepte pas la pratique sur son territoire. Elle cautionne alors des pratiques susceptibles de dérives hors de son territoire et hors de sa compétence…
2. Constat après la réalisation d’une étude terrain...
Notre panel est composé à 79% de femmes. 53% des personnes interrogées sont dans la tranche d’âge 36-55 ans.
Bien que 90% des interrogés savent ce qu’est la gestation pour autrui, 95% des personnes non favorables à la GPA maintiennent leur position. Parmi ces non favorables, 50% ne comprennent pas qu’un couple ait recours à la GPA à l’étranger.
75% des interrogés estiment que les femmes sont libres de leur choix quant à devenir des « mère porteuse ». En revanche, 7% estiment qu’il s’agit d’une commercialisation du corps humain et 4% pensent que les femmes ne le font que pour l’aspect financier. A cet effet, 27% du panel estiment qu’il n’est pas normal que les mères porteuses bénéficient d’une compensation financière pour avoir porté le bébé d’une autre.
Enfin, 30% de notre panel serait prêt à avoir recours à la GPA s’il ne pouvait pas avoir d’enfant, 45% n’a pas réfléchi à la question et 25% préfèrerait se tourner vers l’adoption.
Grâce à une étude terrain ayant permis d’obtenir une centaine de retour, nous avons un échantillon représentatif de l’avis des Français sur le sujet de la GPA, avec 75% des personnes interrogés étant favorable.
Notre panel est composé à 79% de femmes. 53% des personnes interrogées sont dans la tranche d’âge 36-55 ans.
Bien que 90% des interrogés savent ce qu’est la gestation pour autrui, 95% des personnes non favorables à la GPA maintiennent leur position. Parmi ces non favorables, 50% ne comprennent pas qu’un couple ait recours à la GPA à l’étranger.
75% des interrogés estiment que les femmes sont libres de leur choix quant à devenir des « mère porteuse ». En revanche, 7% estiment qu’il s’agit d’une commercialisation du corps humain et 4% pensent que les femmes ne le font que pour l’aspect financier. A cet effet, 27% du panel estiment qu’il n’est pas normal que les mères porteuses bénéficient d’une compensation financière pour avoir porté le bébé d’une autre.
Enfin, 30% de notre panel serait prêt à avoir recours à la GPA s’il ne pouvait pas avoir d’enfant, 45% n’a pas réfléchi à la question et 25% préfèrerait se tourner vers l’adoption.
3. Dans le cas d’une légalisation de la pratique en France...
Aujourd’hui, et d’après notre questionnaire, 79% des participants pensent que les femmes sont libres de leurs choix et de leurs corps, tandis qu’uniquement 15% estiment que c’est une commercialisation du corps. La légalisation de la GPA en France semble donc tout à fait envisageable selon la population.
Mais alors, comment cela se passe-t-il dans les pays où la GPA est légale ?
L’Inde a légalisé la pratique de la GPA en 2002. A partir de cette date-là, elle est devenue une capitale mondiale de la GPA. En effet, les tarifs proposés aux couples étrangers étaient cinq fois moins élevés qu’aux Etats-Unis et la législation était en leur faveur.
La GPA, en Inde, était considérée comme un travail à part entière. Elle était structurée comme une entreprise privée. Les hommes et femmes médecins, étaient considérés comme des chefs d’entreprises et décidaient des procédures et de l’organisation du travail.
Les gestatrices recrutées n'étaient pas les plus pauvres ou les plus démunies, les médecins vérifient lors de leur « recrutement » à ce qu’elles ne dorment pas dans des bidonvilles (pour des questions d’hygiène et de santé) et qu’elles aient la capacité de comprendre que ce ne sera pas leur enfant. Cependant la plupart du temps, les mères porteuses étaient recrutées dans les bagnes du textile et sont donc des ouvrières précaires. Elles étaient choisies sur leur lieu de travail selon certains critères : santé, accès à l'eau courante, celles qui sont le moins pauvres... Elles sont conscientes de la marchandisation de leurs corps mais y voient une exploitation moindre qu’à l’usine.
Une fois recrutée, la gestatrice est sélectionnée par les parents d’intentions, un contrat vient régir les deux parties. En Inde, les FIV ne sont pas encore toujours très connues, et cela oblige parfois à la gestatrice d’avoir des relations extra conjugales.
Cependant dans certaines « baby farms » les mères porteuses étaient inséminées et gardées tout au long de leurs grossesses.
Afin d’éviter les dérives liées à la GPA, et de changer leur image « d’usine a bébé ». L’Inde a voté, en 2016, l’entrée en vigueur d’une loi interdisant aux couples étrangers d’avoir recours à la GPA sur son territoire. Seuls les couples hétérosexuels de nationalité indienne mariés depuis plus de 5 ans peuvent avoir recours à la GPA. La GPA est dans certains pays ou États pleinement reconnu (Inde, Californie), ou parfois réglementée.
Et en France ?
La GPA en France peut être réglementée afin d’éviter certaines dérives. La France devra pouvoir répondre favorablement à la demande de nombreux couples hétérosexuels stériles, homosexuels où de femmes et hommes seuls souhaitant avoir des enfants tout en garantissant une éthique et un contrôle autour de la GPA. Elle peut envisager la mise en place de la GPA sans contrepartie financière (hors frais grossesses) afin d’éviter la marchandisation des corps.
Aujourd’hui, un effort est déjà réalisé vis-à-vis de la reconnaissance des bébés nés d’une GPA à l’étranger. En effet, lorsqu’un couple a recours à une mère porteuse dans un pays étranger qui l’autorise, il peut dès la naissance, inscrire le bébé au consulat français du pays de naissance pour ensuite pouvoir le rapatrier en France. Ainsi les actes de naissances étrangers sont stipulés sur les registres de l’état civil français afin de donner plein effet à la filiation.
Si la légalisation en France pourrait-être envisageable, qu’est ce qui freine sa mise en place ?
4. Dans le cas du maintien des décisions gouvernementales contre la légalisation de la pratique…
Dans un second temps, le principe de solidarité à l’égard des femmes infertiles (argument formulé en 2010 par le Comité consultatif national d’éthique) sera quant à lui, impossible.
Troisièmement, le principe de la liberté morale et de la liberté politique peut lui aussi être remis en cause ici. En effet, le Philosophe R. Orgien se positionne pour la gestation pour autrui en s’appuyant sur le fait de l’absence de nuisance à autrui mais également sur la liberté individuelle politique et selon lui, celle-ci reste très fortement menacée en France par la montée contemporaine de la « pensée conservatrice » La non-acceptation pourrait donc remettre en cause ces deux éléments.
L’autre principe mis en cause est l’inégalité économique. Il ne pourrait pas s’accentuer dans le cadre d’une « non-adoption » de la GPA. De nombreuses études montrent que les donneuses d’ovocytes ou bien les mères porteuses, bien qu’elles ne soient pas toutes issues de milieux défavorisés, n’auraient pas eu recours à ce type de dons si les rémunérations et si leur niveau de vie n’augmentait pas considérablement. Les couples aisés sont ici remis en cause à l’égard des plus pauvres et seraient accusé de profiter de leurs faiblesses. Encore une fois, cet argument peut être remis en cause puisque les études montrent que la mère porteuse, ayant fait le don de son enfant, retient une satisfaction personnelle grâce au don qu’elles viennent d’effectuer, l’aide apportée aux couples ne pouvant pas avoir d’enfant, il n’y a donc pas ici, seulement des bénéfices économiques.
Enfin, renier la gestation pour autrui, reviendrait presque à renier l’avortement. En effet, si nous regardons le principe d’autonomie personnelle de la femme enceinte : lien entre la gestation pour soi et l’avortement : ce principe nous dit que l’autonomie personnelle donc la pleine propriété de soi et de son corps traduit qu’une femme ne doit pas laisser grandir un fœtus au sein de son ventre et de son utérus s’il n’est pas désiré. Si l’on part de ce principe, alors il est possible de décider de laisser grandir un enfant dont nous ne serons pas forcément la mère. La limite de ce principe est qu’il ne prend pas en compte l’éventuel lien que pourrait créer le fœtus et la mère pendant la grossesse. Une analyse phénoménologique de l’expérience de la grossesse révèle qu’il est impossible de créer une frontière, un mur entre la mère qui le porte et le fœtus, un lien se créera.
Nous remarquons donc que les français sont plutôt favorables à la GPA et que les principes remis en cause peuvent être rediscutés. De plus, le reniement de la GPA pourrait aussi traduire un certain reniement à l’avortement. Cependant, il restera à prendre en compte le lien que la mère peut créer avec son enfant tout au long de sa grossesse comme évoqué précédemment.
Bibliographie :
https://babygest.com/fr/inde/#:~:text=Aujourd'hui%2C%20la%20Loi%20indienne,souffrant%20de%20probl%C3%A8mes%20de%20fertilit%C3%A9.&text=Ainsi%2C%20depuis%20l'entr%C3%A9e%20en,d'une%20gestation%20pour%20autrui.
https://www.vie-publique.fr/eclairage/18636-gestation-pour-autrui-quelles-sont-les-evolutions-du-droit
https://www.la-croix.com/Debats/finissait-GPA-2021-06-25-1201163141
https://www.cairn.info/revue-travail-genre-et-societes-2017-2-page-35.htm
https://journals.openedition.org/jda/6364
https://www.cairn.info/journal-travail-genre-et-societes-2012-2-page-183.htm
https://www.sciencedirect.com/science/article/abs/pii/S0001407919325543
https://www.cairn.info/revue-z-2016-1-page-150.htm
https://www.cairn.info/revue-l-information-psychiatrique-2011-7-page-573.htm
https://www.cairn.info/revue-travail-genre-et-societes-2012-2-page-199.htm
https://www.cairn.info/revue-les-cahiers-de-la-justice-2010-4-page-117.htm
https://www.cairn.info/revue-les-cahiers-de-la-justice-2016-2-page-289.htm
https://srvcl-ezproxy.esc-clermont.fr:2073/revue-les-cahiers-de-la-justice-2016-2-page-289.htm#xd_co_f=NGNmYjRhMjEtMzJlOS00NTAzLTk3NDYtZDc2YWU3Y2YzNzIz~