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Les 4 Temps du Management - Réinventer le Management
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Les 4 Temps du Management

Futurologie

Le congé menstruel  : un débat partagé.

Après que le congé paternité ait été au cœur du débat français, c’est au tour du congé menstruel d’être au centre des discussions de l’opinion publique.
Le congé menstruel est un congé attribué aux femmes qui souffrent de douleurs menstruelles leur permettant de poser un jour de congé par mois sans conditions. Selon le projet de loi qui est en débat depuis le début de l’année 2022, le congé menstruel serait un congé uniquement à destination des femmes.

Certaines entreprises pensent que cela creuserait l’inégalité hommes femmes, tandis que d’autres pensent que cela est nécessaire au bon déroulement de la vie professionnelle des femmes atteintes de douleurs menstruelles.

Nous allons donc voir dans cette étude, comment la mise en place d’un congé menstruel au sein des entreprises pourrait être envisageable, qu’est-ce les entreprises en pensent aujourd’hui, et enfin, comment les femmes atteintes de douleurs menstruelles vivent leur vie professionnelle.


L’endométriose  : une maladie encore trop peu connue  
 
L’endométriose qu’est-ce que c’est  ?  
 
«  L'endométriose est une maladie gynécologique fréquente qui touche près de 10 % des femmes. Elle se caractérise par la présence, hors de la cavité utérine, de tissu semblable à celui de la muqueuse de l'utérus (appelée endomètre).  » (Ameli.fr, (2022)). 
L’endométriose touche environ 2 millions de femmes en France, soit environ 2%. Les symptômes étant variées, le diagnostic final de la maladie est difficile à trouver, problème pour avoir des enfants, douleurs pendant les rapports sexuels, fatigue chronique, voici une liste non exhaustive des symptômes liés à l’endométriose, elle met donc environ 7 ans à être correctement diagnostiquée.  
A ce jour, il n’existe aucun traitement définitif pour éradiquer complètement l’endométriose, des soinssont cependant apportés pour soulager la douleur  : la prise d’hormones, la ménopause artificielle, le traitement aux ultras sons ou encore l’intervention chirurgicale.  
Mais tout cela n’est pas suffisant pour toutes ces femmes qui vivent avec la maladie. Cela constitue un frein à leur vie privée et à leur vie professionnelle. (10% de femmes atteintes d'Endométriose, 7 ans en moyenne pour diagnostiquer la maladie, 70% souffrent de douleurs chroniques invalidantes, 40% rencontrent des problèmes d'infertilité, 0 traitement spécifique à l'Endométriose)
  
 
Endométriose et travail  
 

En 2020, l’organisation, Endofrance s’allie à Kerialis pour la rédaction d’un ouvrage nommé « livre blanc », il a pour but d’informer les employeurs et les employés sur les problèmes quotidiens liés à l’endométriose. Après avoir interrogé 15 femmes sur l’endométriose, il faut savoir que deux des symptômes les plus fréquents à l’endométriose sont la fatigue chroniqueet le manque de concentration. Ces deux symptômes sont donc très difficiles à supporter dans certains métiers. Selon l’enquête « Enquête Endovie 2020 IPSOS&Gedeon Richter en collaboration avec EndoFrance», 65% des femmes atteintes de l’endométriose estiment que la maladie à un impact direct sur leur vie professionnelle. Certaines femmes ont des crises de douleurs si intenses pendant la nuit qu’elles n’arrivent pas à dormir, et comment travailler efficacement pendant toute une journée sans avoir dormi de la nuit ? Il est difficile pour certaines d’en parler à leur manager, c’est pour cela que les associations essayent de plus en plus de sensibiliser les personnes sur les impacts de l’endométriose au travail. Certaines entreprises ont même mis en place un congé menstruel, mais qu’est-ce que c’est au juste  ?  

Le congé menstruel  : qu’est-ce que c’est ? 
  

Le congé menstruel est défini comme étant la possibilité de prendre un ou plusieurs jours de congés pour toute personne qui souffre de douleurs menstruelles. En France, le congé menstruel est toujours un sujet tabou même si quelques entreprises ont commencé à le prendre en considération au cours de ces dernières années. Le congé menstruel est destiné à toutes femmes souffrant de douleurs menstruelles afin qu’elles puissent prendre soin de leur santé. Travailler et subir cette souffrance peut s’avérer difficile pour certaines femmes. Et si la mise en place d’un congé menstruel pouvait permettre à ces femmes de vivre sereinement leur vie professionnelle sans se soucier du regard des autres  ? 
  
Certaines entreprises l’ont déjà mis en place  
 
Le congé menstruel existe déjà en : IndonésieCorée du sudZambieTaiwanJapon. L’Espagne est actuellement en train de réfléchir à sa mise en place pour l’année 2022.  
En France, le congé menstruel a été adopté par quelques entreprises telle que « La collective » qui est une entreprise basée à Montpellier et spécialisée dans le recrutement. Première entreprise à mettre en place le congé menstruel en France, La Collective a jugé opportun d’accorder un jour de congé supplémentaire, payé et facultatif par mois à son personnel féminin sans pour autant fournir de justificatif. De plus, cela n’implique aucune diminution de salaire. Les employées peuvent avertir la direction le jour même et peuvent prendre leur jour de congé qui n’est en aucun cas un arrêt maladie. L’entreprise expérimente l’instauration de ce dispositif au sein de son organisation pour permettre aux femmes de vivre leurs douleurs menstruelles plus sereinement et d’encourager les entreprises à sauter le pas
 
Douleurs menstruelles et impacts sur la vie professionnelle 
 
Selon une étude menée par la sociologue Aline Bœuf auprès des employées sur l’impact des menstruations sur leur travail et leur santé également, il a été démontré que les règles, sans être forcément douloureuses, peuvent engendrer une dégradation de productivité, d’énergie et de moral.  
En effet, cela peut impacter leurs interactions dans le milieu professionnel, les femmes interrogées confirment que le cycle menstruel influence leurs humeurs et même leurs comportements. Ces femmes peuvent éprouver également un besoin de s’isoler. Le fait de vouloir éviter toutes interactions sociales au travail déclenche un sentiment de nervosité et d’angoisse. En effet, les interactions ainsi que les échanges sont difficiles à gérer lorsque l’on a des règles douloureuses. D’un autre côté, certaines femmes interrogées sont moins concentrées dans leurs tâches, ce qui engendre une baisse de productivité au travail. Cette même étude avait pour but de connaitre leurs visions concernant le congé menstruel, cette nouvelle notion semble les séduire.  
  
D’après un sondage IFOP en 2021, 68% de françaises ont un avis favorable pour la mise en place d’un congé menstruel. En plus de permettre aux femmes de moins souffrir (physiquement et moralement) pendant leur cycle menstruel, il est garant l’abolition de tabous autour des menstruations et au maintien de la confiance entre les organisations et leurs employés.  
  
Des avis partagés  
 

Actuellement, nous constatons que très peu d’entreprises ont mis en place un congé menstruel au sein de leur structure, bien que cela se démocratise de plus en plus, les avis restent tout de même mitigés quant à la mise en place de celui-ci. Pour aller plus loin dans notre analyse, nous avons décidé d’interroger six entreprises issues de différents secteurs d’activité. Par souci de confidentialité, les noms des entreprises et des personnes interrogées (juristes, RRH) resteront anonymes.   
  
Sur les six entreprises interrogéescinq d'entre elles ont répondu défavorablement à la mise en place d’un congé menstruel dans leur structure. Toutefois, l’entreprise issu du secteur médical que nous avons interrogée ne serait pas contre l’idée de l’intégrer au sein de leur structure, cependant, sa mise en place serait très compliquée.   
En effet, comme nous l’indique le RRH, 80 % des salariés sont des femmes, les plannings sont établis 1 an à l’avance et le personnel est extrêmement manquant. L’entreprise médicale est tout à fait consciente qu’un congé menstruel pourrait faciliter le quotidien de certaines femmes, mais au vu des nombreux problèmes que rencontrent ce secteur aujourd’hui (manque de personnel, manque de budget...) il serait très difficile de le mettre en place.   
  
Deux entreprises nous évoquent le fait que selon eux, le congé menstruel engendrerait trop d’abus de la part des salariés, une d’entre elles nous parle même d’égalité hommes femmes en disant : «  C’est également une porte ouverte à pleins d’abus. Les entreprises risqueraient, à la suite de la mise en place d’un congé menstruel, d’embaucher plus d’hommes que de femmes.  »  
  
D’une autre part, deux autres entreprises nous expliquent être davantage préoccupées par les difficultés organisationnelles et surtout par le coût financier que le congé menstruel pourrait générer. Un RRH nous explique que : « C’est un coût financier non négligeable, il y a le coût des congés + le coût des heures supplémentaires des autres employés pour compenser les absences.  » 
  
Pour une autre entreprise, le juriste nous explique : « qu’au sein du groupe, un accord portant sur la Qualité de Vie au Travail a récemment été conclu, et que la mise en place d’un congé menstruel n’a nullement été évoqué ou envisagé, que ce soit par la Direction ou les organisations syndicales» Il rejoint également le point de vue des deux autres entreprises qui ont évoqué les difficultés opérationnelles que la mise en place du congé menstruel pourrait causer.   
  
Nous avons décidé de finir nos entretiens en posant la question suivante à nos interlocuteurs : « Dans 10 ans, est-ce que vous pensez que le congé menstruel deviendra une norme dans toutes les entreprises ? » L’entreprise médicale n’a pas souhaité répondre à cette question, cependant, deux entreprises ont été catégoriques et ont répondu négativement sans argumentation, une entreprise explique que selon elle cela est peu probable mais pas impossible, une autre argumente en disant :  « Je ne pense pas, peut-être dans 20/30 ans même 50 ans. »
 
Pour finir, le juriste de l’entreprise qui nous a parlé d’un accord portant sur la Qualité de Vie au Travail, a un avis totalement différent des autres entreprises. Effectivement, celui-ci nous explique que :  
« Dans les TPE et PME, et particulièrement dans certains secteurs d'activité (BTP, artisanat, ect), il me semble peu probable que le congé menstruel devienne une norme dans les 10 à 15 prochaines années, sauf si le législateur en décide autrement. Pour les grandes entreprises, qui disposent d'une réelle culture de la négociation collective et qui n'hésitent plus à s'approprier des sujets/dispositifs pour être innovants et attractifs, nul doute que le congé menstruel puisse devenir une norme dans les 10 à 15 prochaines années. »
 
De manière générale, toutes les entreprises interrogées nous font part des difficultés qu’elles pourraient rencontrer si elles mettaient en place un congé menstruel au sein de leur structure. Comme nous le disions, les avis restent mitigés. En effet, les entreprises que nous avons interrogées sont plutôt défavorables à la mise en place d’un congé menstruel, cependant, des entreprises françaises comme “L’équipe LOUIS” et “Critizr” ont été les premières à avoir mis en place un congé menstruel qui donne aux femmes la possibilité de poser un jour de congé par mois.  
 
 
En conclusionles mentalités changent quant au regard des douleurs menstruelles causées par certaines maladies comme l’endométriose. Les langues des femmes se délient et le sujet des douleurs menstruelles devient de moins en moins tabou.  
La mise en place d’un congé menstruel est déjà actée dans plusieurs pays. Certaines entreprises françaises émettent cependant des réserves, elles craignent que celui-ci ne fasse que creuser l’inégalité entre les hommes et les femmes et favorise l’employabilité des hommesAu contraired’autres pensent que ceci est primordial au maintien du bien être des femmes, au regard de cela, des entreprises françaises commencent peu à peu à mettre en place le congé menstruel. Attention tout de même à bien veiller au cadre légal de sa mise en place, de respecter l’égalité de traitement entre tous les salariésde respecter la vie privée des salariés, et notamment l’identité de genre et les problèmes de santé. Le nombre de jours du congé menstruel n’est pas encore légalement décidé, les entreprises qui l’ont mis en place optent pour un jour par mois. Il faut alors vérifier que l’ensemble des salariés soient favorables à la mise en place de ce congé menstruel. Mettre en place ce congé dans des entreprises de plus de 50 salariés s’avère donc être plus compliqué.  
 
Peut-on envisager que dans 30 ans, le congé menstruel fasse partie intégrante de la réglementation des entreprises  ? Au contraire, est-ce que cela est inenvisageable au vu des avis divergeant ?  
 
 
Bibliographie  :  
 
 
 
 
Auteurs :

Amar Leila/ Abied Jalila/ Atonga Jayson/ Batoz Océane/ Berge Guillaume 
 

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