C'est sur ce principe que Dimitri Mendeleïev a pu établir la première version du tableau de classification périodique des éléments. Dès le XIXème siècle, ce chimiste célèbre cherche à classer les éléments connus par ordre de poids atomique croissant. Il les dispose dans une " matrice " et les arrange de telle sorte que les éléments d'une même colonne possèdent des propriétés comparables. Il obtient des cases " vides " : il les réserve aux éléments " non encore découverts ". En d'autres termes, la matrice contient des éléments chimiques virtuels : il ne restera plus à ses successeurs qu'à prolonger cette investigation. Le premier tableau de Mendeleïev, publié en 1869 contenait 63 éléments connus. Au moment de sa mort (en 1907), il en contenait 86.
Dans l'intervalle, le gallium, le scandium et le germanium étaient découverts. Or, ils avaient leur place dans les cases vides correspondantes ! L'élément 101 porte aujourd'hui le nom de mendélévium (Md) en l'honneur de celui qui permit ce grand pas dans la généralisation des principes chimiques.
La construction d'une matrice de la découverte repose sur le choix des rubriques qui composent la ligne et la colonne. L'analyse des variables sur lesquelles on souhaite porter l'investigation permet de dresser un inventaire des caractéristiques que l'on veut faire se rencontrer (par exemple outils et tâches, produits et clients, techniques et formes,...)
La construction d'une matrice de la découverte repose sur le choix des rubriques qui composent la ligne et la colonne. L'analyse des variables sur lesquelles on souhaite porter l'investigation permet de dresser un inventaire des caractéristiques que l'on veut faire se rencontrer (par exemple outils et tâches, produits et clients, techniques et formes,...)
La grille ci-contre croise l'ensemble des objets qui peuvent se mouvoir à partir de trois sources d'énergie et en fonction du nombre de roues. Traction humaine à une roue : la brouette, le vélo de cirque,... En croisant les cases, on retrouve une multitude d'objets connus. On peut aussi en imaginer ou redécouvrir de nouveaux : patins à roulettes motorisées, tondeuse à gazon à voiles, side-car à pédales,...
La construction matricielle permet également d'expliquer une démarche, un programme, un plan d'action : elle a une valeur pédagogique. Dans le domaine de la stratégie d'entreprise, les cabinets de consultants (BCG, ADL, McKinsey) recourent depuis les années 60 à ce type de formulation et de présentation des portefeuille d'activités des groupes industriels à partir de plusieurs critères (place dans le cycle de vie, part de marché relative, taux de croissance, position concurrentielle,...). En une page, la représentation graphique obtenue donne des indications sur l'équilibre du portefeuille et sur des perspectives d'allocation de ressources.
La construction matricielle permet également d'expliquer une démarche, un programme, un plan d'action : elle a une valeur pédagogique. Dans le domaine de la stratégie d'entreprise, les cabinets de consultants (BCG, ADL, McKinsey) recourent depuis les années 60 à ce type de formulation et de présentation des portefeuille d'activités des groupes industriels à partir de plusieurs critères (place dans le cycle de vie, part de marché relative, taux de croissance, position concurrentielle,...). En une page, la représentation graphique obtenue donne des indications sur l'équilibre du portefeuille et sur des perspectives d'allocation de ressources.
Le quadrillage d'un problème, d'un procédé ou d'une situation en deux dimensions a nécessairement un caractère réducteur. Dans le même temps, il permet de mieux visualiser les extrêmes et les zones d'intersection entre les différentes composantes de l'objet étudié.
2.6 La bissociation
La bissociation élaborée par Arthur Koestler rend compte du double mouvement contenu dans la démarche de croisement : détruire pour construire, concasser pour croiser, dissocier pour associer. Les méthodes combinatoires permettent de systématiser l'apparition de liens entre différents champs de pensée, entre des représentations qui paraissent a priori éloignées ou indépendantes.
Johannes Gutenberg, originaire de Mayence en Allemagne, est traditionnellement considéré comme l'inventeur de l'imprimerie occidentale au milieu du XVème siècle. En cherchant à reproduire mécaniquement le travail soigné des moines copistes, Gutenberg - et ses contemporains - butaient sur une question technique : le moulage de lettres sur des supports en bois et la technique de reproduction par ancrage et brossage du papier produisaient un résultat médiocre.
Gutenberg réussit - dit-on - à surmonter ces difficultés techniques en pratiquant plusieurs " bissociations ". La première consista à s'inspirer des moulages utilisés pour réaliser les pièces de monnaie. Plutôt que de creuser le moule dans lequel le métal était fondu, il eut l'idée de le sculpter pour faire apparaître des caractères en relief. En observant le fonctionnement des pressoirs à vin dans la vallée du Rhin, et les empreintes qu'elles laissaient sur le raisin après leur passage, il conçut ensuite le système de " presse " rotative. En plaçant enfin les caractères mobiles sur le châssis de la presse, il jeta les bases d'un nouveau procédé... d'imprimerie.
A mi-chemin entre l'approche analogique et la démarche combinatoire, la bissociation consiste donc à " forcer " le rapprochement entre deux situations pour provoquer l'illumination, à l'image des silex que l'on entrechoque pour faire jaillir l'étincelle.
Gutenberg réussit - dit-on - à surmonter ces difficultés techniques en pratiquant plusieurs " bissociations ". La première consista à s'inspirer des moulages utilisés pour réaliser les pièces de monnaie. Plutôt que de creuser le moule dans lequel le métal était fondu, il eut l'idée de le sculpter pour faire apparaître des caractères en relief. En observant le fonctionnement des pressoirs à vin dans la vallée du Rhin, et les empreintes qu'elles laissaient sur le raisin après leur passage, il conçut ensuite le système de " presse " rotative. En plaçant enfin les caractères mobiles sur le châssis de la presse, il jeta les bases d'un nouveau procédé... d'imprimerie.
A mi-chemin entre l'approche analogique et la démarche combinatoire, la bissociation consiste donc à " forcer " le rapprochement entre deux situations pour provoquer l'illumination, à l'image des silex que l'on entrechoque pour faire jaillir l'étincelle.
Tout le monde connaît le jeu de Scrabble® inventé pendant la crise de 1929 par un architecte new-yorkais au chômage : Alfred Butts (Scrabble ® est une marque déposée par J.W.Spear & Sons PLC, Enfield, Angleterre). Son introduction en France dans les années 50 nous a familiarisés avec les WU, KHI et autres mots " compte triple " du plateau de jeu. Une version " Duplicate " de la règle du jeu consiste à faire concourir les joueurs à partir d'une distribution publique des lettres sur un seul chevalet : tout le monde a le même jeu...
Celui qui trouve la combinaison la plus payante sur le plateau marque les points correspondants. Peut-on, à l'aide de bissociations sur une matrice de la découverte, inventer de nouvelles règles du jeu ? Croisons les ingrédients du jeu avec d'autres accessoires ou procédés empruntés aux jeux de cartes, de hasard, ...
Celui qui trouve la combinaison la plus payante sur le plateau marque les points correspondants. Peut-on, à l'aide de bissociations sur une matrice de la découverte, inventer de nouvelles règles du jeu ? Croisons les ingrédients du jeu avec d'autres accessoires ou procédés empruntés aux jeux de cartes, de hasard, ...
Sept suggestions parmi des centaines d’autres :
1 : Le joueur place un pion sur le plateau et se déplace avec un dé. La case où est le pion lui indique la ligne et la colonne sur lesquelles il peut placer son mot.
2 : Un dé à six faces lui permet de multiplier son score par 1, 2, 3, 0, -2, …
3 : Le nombre de lettres qu’il peut piocher après avoir posé un mot lui est donné par la valeur du dé.
4 : Le sablier est gradué avec un système de bonus décroissant : plus le joueur tarde, moins il marque de points.
5 : Les joueurs décident d'un niveau de difficulté en plaçant des calques sur le plateau (parties commencées par des joueurs confirmés, cases noires inutilisables comme dans les mots croisés, bonus réguliers, ...).
6 : Un jeu de cartes est associé aux accessoires. Chaque joueur peut faire valoir un joker (une faute d'orthographe autorisée, possibilité d'utiliser un mot étranger, interdiction à un adversaire d'écrire un adjectif,...)
7 : Un jeu de cartes donne périodiquement des consignes aux joueurs : les mots placés doivent rapporter plus de vingt points, moins de douze points, contenir un " S ", être placé sur un mot " compte double ", utiliser cinq lettres, ...
1 : Le joueur place un pion sur le plateau et se déplace avec un dé. La case où est le pion lui indique la ligne et la colonne sur lesquelles il peut placer son mot.
2 : Un dé à six faces lui permet de multiplier son score par 1, 2, 3, 0, -2, …
3 : Le nombre de lettres qu’il peut piocher après avoir posé un mot lui est donné par la valeur du dé.
4 : Le sablier est gradué avec un système de bonus décroissant : plus le joueur tarde, moins il marque de points.
5 : Les joueurs décident d'un niveau de difficulté en plaçant des calques sur le plateau (parties commencées par des joueurs confirmés, cases noires inutilisables comme dans les mots croisés, bonus réguliers, ...).
6 : Un jeu de cartes est associé aux accessoires. Chaque joueur peut faire valoir un joker (une faute d'orthographe autorisée, possibilité d'utiliser un mot étranger, interdiction à un adversaire d'écrire un adjectif,...)
7 : Un jeu de cartes donne périodiquement des consignes aux joueurs : les mots placés doivent rapporter plus de vingt points, moins de douze points, contenir un " S ", être placé sur un mot " compte double ", utiliser cinq lettres, ...
Dans le domaine littéraire, la bissociation permet de créer de nouveaux mots, par jeu ou par nécessité (traduction, usage d'un terme officiel de la langue française). Le procédé donne naissance à de nouveaux termes, du néologisme savant au télescopage burlesque.
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